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Adieu à un grand serviteur du transport aérien : Claude Trudel

Adieu à un grand serviteur du transport aérien : Claude Trudel

Le 2 octobre nous quittait Claude Trudel. Il est parti discrètement, tout comme il a vécu sa vie entière, c’est-à-dire en évitant d’attirer trop d’attention sur lui-même. Quoiqu’il s’efface en douceur, cet homme aura eu un impact énorme sur l’industrie du transport aérien au Québec pendant plus de 40 ans.

Analyste sénior à Transports Québec depuis les années 80, il n’a jamais cherché à gravir les rangs du ministère, de peur de se voir assigner des tâches administratives et s’éloigner des dossiers du transport aérien au Québec, son pain quotidien. Passionné par l’aviation commerciale, il lisait sans cesse tout ce qui se disait au sujet du transport aérien. Même la retraite n’a pas réussi à calmer cette ardeur.

Claude était un incontournable dans le transport aérien au Québec. Aucune décision n’était prise au ministère avant d’avoir consulté Claude. À l’époque où j’œuvrais à titre de Chef de cabinet du ministre des Transports du Québec, il était fréquent que Claude soit invité à participer à des discussions où même son directeur et son sous-ministre adjoint ne soient pas présents, tant il avait la confiance de ses pairs.

Impressionné par l’étendue et la profondeur de ses connaissances, on avait aussi confiance à son jugement, car on savait que ses positions n’étaient pas opportunistes en termes d’avancement de carrière, mais guidées par ses convictions et les leçons tirées par les expériences dans la matière ailleurs au monde. Son opinion était fortement sollicitée par les mandarins qui avaient à cœur le transport aérien au Québec. J’ai souvent vu le ministre des Transports insister pour que Claude l’accompagne dans des rencontres, ce qui était inédit dans la structure organisationnelle du ministère. Il connaissait à fond tous les dossiers, mais surtout il connaissait très bien les intervenants et leurs positions, ce qui nous accordait un avantage indéniable.

Tous les gros dossiers de transport aérien au Québec au cours des 40 dernières années sont passés sous sa loupe. Claude est intervenu directement dans les dossiers de l’aide au transport aérien régional, subventions au transport aérien, programmes de réduction de prix pour les passagers du transport aérien en région, subventions aux associations québécoises de pilotes, d’aéroports, ou de transporteurs aériens, le renouvellement de la flotte du SAG, la privatisation des services gouvernementaux de nolisement du transport aérien et le développement du réseau aéroportuaire au Nunavik, pour ne nommer que ceux-là.

On a aussi fait appel à ses conseils dans les dossiers tels que la cession des aéroports fédéraux aux municipalités, le français dans l’air, la fermeture de Mirabel au profit de Dorval, le maintien du siège social d’Air Canada à Montréal, et l’avenir de l’aéroport Montréal-Trudeau en tant que plaque tournante du transport aérien au Canada. Ses recommandations n’ont jamais été influencées par la volonté politique mais plutôt par son appréciation de l’importance du transport aérien sur la société québécoise, particulièrement pour les populations vivant en régions éloignées et nordiques.

L’Association québécoise du transport aérien (AQTA) est toujours active en partie parce que Claude est intervenu à plusieurs reprises, insistant que les associations québécoises dans le secteur du transport aérien ne pourraient survivre sans l’appui financier du gouvernement, surtout pendant les époques où le courant politique poussait vers le désengagement gouvernemental.

Heureusement, son énorme contribution a été reconnue par l’industrie lorsque l’AQTA lui a octroyé, en 2015, le Prix Roland G. Lefrançois, le plus prestigieux témoignage de l’industrie du transport aérien du Québec à l’un des siens, seulement la cinquième fois que ce prix était octroyé depuis 1976, et la seule fois qu’il n’a pas été accordé à un exploitant du transport aérien.

Certainement pas en quête de reconnaissance, Claude a toutefois été particulièrement touché par cette reconnaissance de l’industrie. Une déception pour cet homme d’un grand intellect est que son projet de Chaire en transport aérien dans une université québécoise n’ait pas vu le jour, malgré tant d’initiative, de créativité, d’efforts et de démarchage auprès des ministères et des fonds publics et privés pour lancer ce projet, pourtant bon pour la collectivité et l’enrichissement de l’expertise d’un secteur qui en a grandement besoin.

Sur le plan personnel, Claude était un ami chaleureux, quelque peu espiègle, ricaneur, amateur de bon vin et passionné par la politique, qu’elle soit provinciale, nationale ou internationale, le tout toujours en compagnie de la femme de sa vie, son épouse Sylvie. Ce fut un réel honneur pour moi de le côtoyer pendant toutes ces années.

Malheureusement, l’énorme contribution de Claude au développement du transport aérien au Québec passera largement inaperçue, alors souhaitons que ces quelques lignes lui rendent tant soit peu un hommage bien mérité et perpétueront l’œuvre et la passion contagieuse de mon cher ami Claude.

John McKenna
Président et chef de la direction
Association du transport aérien du Canada 

 

L'AQTA offre ses plus sincères condoléances aux proches de Claude Trudel, dont à sa conjointe Sylvie.